En octobre 2024 plus de 30 000 avocats représentant le barreau distant ont voté parmi environ 64 066 avocats inscrits pour élire un nouveau bâtonnier. Ils ont élu un ancien député du Parti républicain du peuple (CHP, social-démocrate), principale force de l'opposition turque, avocat et professeur de droit constitutionnel, qui a critiqué la gouvernance précédent du barreau pour ne pas avoir
suffisamment élevé la voix contre le gouvernement turc.
Le 23 décembre 2024, le nouveau bâtonnier et les membres du conseil de l’ordre des avocats d'Istanbul ont appris qu’il faisait objet d’une enquête pénale pour « propagande pour une organisation terroriste » et « diffusion publique d'informations trompeuses ».Il leur est reproché d’avoir publié des écrits sur la mort sur des journalistes Nazim Dastan et Cihan Bilgin, tués le 19 décembre dans une attaque de drone armé qui aurait été menée par la Turquie dans le nord de la Syrie. Dans une déclaration écrite, le barreau d’Istanbul avait exprimé un avis juridique : « Le ciblage des journalistes dans les zones de conflit constitue une violation du droit international humanitaire et des Conventions de Genève. De plus, le ciblage de civils qui ne sont pas parties à un conflit est défini comme un crime de guerre selon le Statut de Rome. Par conséquent, les règles concernant la protection des journalistes travaillant dans les zones de conflit armé relèvent du droit international humanitaire ». En réponse à l’ouverture de l'enquête qui le vise, le barreau d’Istanbul a répondu : « Notre barreau, qui a toujours défendu les droits de l'homme et l'État de droit, appelle toutes les institutions constitutionnelles et les organes juridiques à respecter la Constitution, les lois et les principes généraux du droit, en particulier les règles de procédure. »
Le procureur d'Istanbul a accusé le bâtonnier et les membres du conseil de l’ordre de "faire la propagande d'une organisation terroriste" et de "diffusion publique d'informations trompeuses" par ce qu’ils auraient prétendument fait l'éloge de deux membres de l'organisation terroriste PKK sur le compte de médias sociaux du barreau le 21 décembre 2024. L'enquête visait 11 suspects, dont İbrahim Kaboglu, et 10 membres de son conseil de l’ordre.
Ils ont fait l’objet d’un interrogatoire par le parquet le 7 janvier.
Sans désemparer, le procureur général d’Istanbul a lancé une action en justice aux termes de laquelle il demande la destitution du bâtonnier et des membres du Conseil de l’ordre. Le parquet fondait sa demande sur la disposition selon laquelle « les organisations professionnelles ayant le statut d'institutions publiques ne peuvent pas s'engager dans des activités autres que leur objectif ».Il demandait en conséquence qu’Ibrahim Kaboglu et les membres du conseil soient révoqués de leurs fonctions et que de nouvelles élections soient organisées pour les remplacer.
Face à ces attaques contre la profession d’avocat en Turquie, Ibrahim Kaboglu a déclaré lors d’une conférence de presse : « Il s'agit d'une intervention extérieure dans la gestion démocratique du barreau. C'est une intervention dans la volonté démocratique des milliers d'avocats qui ont élu le bâtonnier d'Istanbul le 20 octobre 2024 ».
Le barreau d’Istanbul a décidé d’organiser une assemblée générale extraordinaire le 23 février 2025 pour selon les propos d’Ibrahim Kaboglu « Le congrès du 23 février annoncera à toute la Turquie, au pouvoir législatif, exécutif et judiciaire, ce qu'est la démocratie, que la démocratie ne peut être construite que par la loi et les 66 à 67 000 avocats du Barreau d'Istanbul."
Le 21 mars 2025, le bâtonnier d'Istanbul et les membres de son conseil de l'ordre, poursuivis pour "propagande terroriste" et "diffusion publique de fausses informations", ont été démis de leurs fonctions selon une décision de justice publiée le jour même en ligne par une association d'avocats.
Le bâtonnier Ibrahim Kaboglu, ancien député du Parti républicain du peuple (CHP, social-démocrate), principale force de l'opposition turque à laquelle appartient le maire d'Istanbul Ekrem Imamoglu, arrêté le 19 mars pour "terrorisme" et "corruption".
Avant même, de connaître la décision de la justice turque, le matin du 21 mars 2025 le jury du prix Ludovic Trarieux 2025 avait attribué sa mention spéciale : "BARREAU DE L’ANNÉE" réservée chaque année à un barreau pour son engagement au service de l’indépendance des avocats, sa lutte exemplaire pour l’État de droit et pour les souffrances endurées au service des droits de l’Homme.
à l’unanimité des votants,
au BARREAU d’ISTAMBUL.