Augusto Zúñiga-Paz †
Prix Ludovic-Trarieux
1992
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Le 15 mars 1991, Augusto Zúñiga-Paz,
avocat à Lima, a reçu un pli personnel dans les locaux de la Comisión de Derechos Humanos (COMISEDH) (Commission Indépendante des
Droits de l'Homme), une des organisations rassemblées dans la Coordination
nationale des droits de l'homme au Pérou, dont il était le responsable des
services juridiques. C'était une lettre piégée. Lorsqu'il l'a ouverte,
l'explosion lui a arraché l'avant-bras gauche. L’engin explosif avait été
placé dans une grande enveloppe, revêtue du cachet du secrétariat de la
présidence de la République. Selon le ministère de la Défense, les analyses
ont révélé que l'explosif était d'un type utilisé uniquement par la Marine. |
Augusto Zúñiga-Paz travaillait depuis de nombreuses années pour la
COMISEDH, et s'occupait de plusieurs dossiers sensibles de violation des droits
de l'homme. Il était l'avocat de la famille d'Ernesto Rafael Castillo-Páez, un
étudiant "disparu il après son arrestation par la police. Il avait
présenté une requête en habeas corpus et obtenu de deux juridictions
successives une ordonnance de remise en liberté immédiate. C'était la première
fois, depuis presque une décennie, qu'un juge péruvien déclarait
"fondée" une telle requête. Le Procureur de l'État a
demandé l'annulation de l'ordonnance, et le 7 février 1991, la Cour Suprême a
prononcé l'annulation de l'habeas corpus pour des motifs de forme. Dès
le ler février, cependant, Augusto Zúñiga Paz avait reçu des menaces de mort pour le dissuader
de vouloir faire toute la lumière sur cette disparition. Il en avait informé la
Cour Suprême mais ne s'était vu octroyer aucune protection. Par la suite, une
commission d'enquête du Sénat péruvien a été chargée de faire la lumière, mais
ses travaux ne devaient aboutir à aucun résultat.*
Réfugié politique en Suède avec sa
femme et son petit garçon, Augusto Zúñiga-Paz a
poursuivi son combat pour les droits de l'homme et contre tous " les
terrorismes". Il a dit :
"Ils ne m'ont pas fait peur. Ils m'ont arraché le bras mais ma volonté est intacte."
Il a reçu, le 8 avril 1992 à
Bordeaux, le prix international des Droits de l'Homme "LUDOVIC
TRARIEUX". Sa candidature au Prix avait été présentée par "Amnesty
International – France.
Après avoir consacré
une grande partie de sa vie à dénoncer les violations des droits humains
commises par les forces de sécurité lors du conflit interne qui a secoué le
Pérou (1980-2000), et à lutter contre l’impunité, Augusto Zúñiga
Paz est décédé le 18 mai 2005.
* Saisie du cas de la
disparition d'Ernesto Rafael Castillo-Páez, la Cour Inter-américaine
des droits de l’Homme a condamné a l’unanimité le Pérou par arrêt en date du 3
novembre 1997 pour la violation des articles 1-1, 4, 5, 7 et 25 de la Convention
américaine des droits de l’homme.