Le
XXIVème Prix International des Droits de l’Homme
"Ludovic-Trarieux" 2019
attribué à
Rommel
DURAN CASTELLANOS
COLOMBIE
Le XXIVème Prix International des Droits de l’Homme
"Ludovic-Trarieux" 2019 a été remis, à l'occasion du 63ème Congrès
de l'Union Internationale des Avocats (UIA), le 8 novembre 2019 à Luxembourg
à l’avocat colombien Rommel DuránCastellanos, 33 ans, président de l’Equipo
Juridico Pueblos (EJP), en plus d'être un bénévole du Comité pour la
solidarité avec les prisonniers politiques (CSPP), à Bucaramanga, dans le
département du César.
Cérémonie de remise du Prix 2019
Remise
du prix par
Monsieur
le Bâtonnier IssoufBAADHIO, Président de l’UIA
Discours de Monsieur
le Bâtonnier IssoufBAADHIO, Président de l’UIA
Je souhaite la bienvenue à tous à ce congrès de l’UIA que j’ai l’immense plaisir et le bonheur de présider dans une ambiance de convivialité et de confraternité qui est comme vous le savez, l’ADN de notre organisation.
Permettez-moi, avant tout propos de saluer avec beaucoup de plaisir le Bâtonnier Favreau et le travail immense qu’il fait pour la protection des Avocats en danger à travers le monde. L’UIA est particulièrement honorée d’être partie prenante à ce combat digne.
Je souhaiterais donner tout de suite la parole au Bâtonnier Favreau afin de prononcer des mots de bienvenue et vous dérouler le chronogramme de cette cérémonie de remise du prix autour de laquelle nous sommes tous aujourd’hui présents, venus de toutes les parties du monde et représentant tout ce que notre métier peut compter de personnes convaincues de la nécessité impérieuse de préserver partout l’intégrité physique et intellectuelle des Avocats, de protéger la liberté absolue de leur exercice professionnel et de les prémunir autant que nous le pouvons du danger permanent qui pèse sur eux dans de trop nombreuses parties du monde du simple fait d’exercer leur métier.
Le courage de nos confrères, menacés, en danger, pourchassés et persécutés nous honore... mais nous devons tous avoir conscience que si ce courage n’a pas de prix…il a hélas bien souvent un coût terrible pour nos confrères qui peut, dans bien des cas conduire à la perte de la vie.
La vascularisation des systèmes politiques et institutionnels dans certains pays particulièrement dédiés à la répression, à la persécution des avocats du seul fait de leur engagement professionnel est particulièrement inquiétante et préoccupe au plus haut point l’UIA qui, dans ce domaine, constitue une véritable vigie, en alerte permanente à travers les cinq continents, prête à tout instant à voler au secours de nos confrères en déployant des missions sur place pour assister nos confrères, alerter les organisations internationales et autorités politiques et dénoncer toujours avec véhémence mais avec justesse et pertinence ces dérives. Je m’honore pour ce qui me concerne d’avoir participé à une de ces missions pour le compte de l’UIA au Burundi il y a déjà quelques années.
J’aurai tout à l’heure l’honneur de remettre le prix à notre confrère de Colombie Rommel Durán Castellanos dont le courage nous rappelle que notre métier est un véritable paravent des libertés et que son exercice constitue à la fois un bonheur et un véritable danger. C’est la terrible équation avec laquelle nous devons vivre et je vous invite tous et toutes à rester vigilants et pro actifs pour qu’être Avocat ne soit plus nulle part au monde un danger pour celui ou celle qui exerce cette noble profession.
Je vous remercie de votre aimable attention et encore une fois de votre présence, et je laisse la parole au Bâtonnier Bertrand Favreau que je salue encore une fois pour son abnégation, sa persévérance dans ce combat qui est le nôtre.
Bâtonnier Issouf BAADHIO
Président de l’UIA
Voir la video
Monsieur
Rommel DuránCastellanos
a reçu
successivement les discours d’hommage de
·Discours de Monsieur le Bâtonnier François KREMER,
Bâtonnier de l'Ordre des Avocats du
Barreau de Luxembourg, (en attente)
·Discours de Madame Agaath S. REIJNDERS-SLUIS au
nom de Barreau d’Amsterdam)
Discours de Discours du Dr Bilinç ISPARTA (au nom du barreau de Berlin)
·Discours de Monsieur Sandro VECCHIO, au nom de l’Ordre des Avocats de
Genève
·Discours de Monsieur Christophe PETTITI (au nom de l'Institut des
Droits de l’Homme du Barreau de Paris)
·Discours de Monsieur le Bâtonnier Yves OSCHINSKY (au nom de l'Institut
des Droits de l’Homme)
·Discours de Monsieur Anton Giulio LANA (au nom de
UFTDU)
Discours de Monsieur le Bâtonnier Bertrand FAVREAU
(Président du Jury IDHBB/IDHAE)
Hommage aux avocats colombiens
(extraits)
(… )
Les menaces loin d’être mineures relèvent d’une graduation et font partie d’une parfaite articulation entre des souffrances récurrentes et cumulatives, imposés à certains avocats. Les menaces de mort, insistantes et réitérés, constituent dès les prémices des atteintes les plus graves, en Colombie. Car avant l’élimination physique, la détention, la radiation il y a la dissuasion : le harcèlement lancinant, l’intimidation récurrente, les pressions latentes, les entraves multipliées parmi lesquels les menaces de mort prennent une forme déterminante, souvent la plus apparente.
Comme s’il fallait à tout prix faire taire les avocats des sans voix
Les menaces ne peuvent s’apprécier en vérité qu’à l’aune du danger. En Colombie plus qu’ailleurs, il est périlleux de défendre les plus défavorisés comme s’il fallait à tout prix faire taire les avocats des sans voix. Car on les fait taire en effet…
En avril 1998 Eduardo Umaña Mendoza, éminent avocat des syndicalistes, des prisonniers politiques et des familles de personnes disparues dont le nom est aujourd’hui révéré les défenseurs des droits de l’homme colombien, qui avait prémonitoirement figuré parmi les candidats retenus pour le vote final du Jury du Prix Ludovic Trarieux en 1996, a été assassiné dans son bureau de Bogota, par un « escadron de la mort » qui s'étaient fait passer pour des journalistes. Umaña Mendoza, qui avait réchappé à au moins deux tentatives antérieures de meurtre dans la décade précédente, a laissé en héritage le cabinet d’avocats qu’il avait œuvré à fonder : la Corporación de Colectivo Abogados " José Alvear Restrepo ". Aujourd’hui, ses membres en sont persécutés tour à tour.
En avril 2004, ce fut au tour de Carlos Bernal Ramirez, l'avocat défenseur du monde du travail, et de son garde du corps d’être tous les deux assassinés, dans le Prado Norte au voisinage de Cucuta. S’il faut en croire le Comité Permanent pour la Défense de Droits de l’Homme (CPDH), une des plus importantes ONG de Colombie, ils ont été tués par des paramilitaires qui opèrent avec le consentement de l'armée colombienne dans un pays qui a déjà connu un demi-siècle de guerre civile.
D'autres, subissent chaque jour une persécution récurrente, subtile, perverse : violences répétées, menaces permanentes, harcèlements étatiques, plus souvent mises en œuvre par un instrument judiciaire non indépendant du pouvoir ou livrés sans protection aucune à l'acharnement de groupes particuliers ou de factions, que l'inertie policière et judiciaire contribue à renforcer dans une escalade souvent fatale.
Chaque année ou presque, les menaces de mort que nous recensons contre les avocats fournissent une liste qui s’allonge pour la Colombie. Car, en Colombie plus qu’ailleurs, la menace est toujours le signe annonciateur d’un proche accomplissement. Même s’ils ne tombent pas sous les balles de mortifères escadrons, suscités ou tolérés, on y laisse mourir les avocats les plus exposés sans leur accorder le minimum de protection, quand on ne les désigne pas comme des cibles permanentes. La Colombie est ainsi le pays des menaces en série, mais aussi des prémonitions accomplies et des avertissements suivis d’effet. Les menaces, singulières ou récurrentes, renferment toujours, en Colombie, la certitude de lendemains funèbres.
Là-bas en effet les menaces ne sont pas ces « nuées qui passent bien loin sur nos têtes » qu’évoquaient avec légèreté nos comédies des siècles passés. Il s’agit véritablement d’une réalité tragique et quotidienne. Une menace permanente diffuse dont nul ne saurait plus donner, en Colombie comme ailleurs, l’exacte statistique… Sans doute y-a-il plus de morts dans le Valle del Cauca mais les effets annoncés de toute commination sont les mêmes qu’à Cali ou à Tulua, que ce soit à Bogotá, à Cartagena, Valledupar, Bucaramanga, Medellín, Barranquilla, Pereira ou ailleurs. En 2014, un avocat qui présidait alors la fondation des droits de l’homme de Pitalio, Emiro Bravo Muñoz, a été obligé de quitter la ville en raison des menaces de plus en plus précise qu’il recevait. En 2017, Luis Genaro Ochoa Sánchez a été abattu en face du palais de justice de Pitalio.
Saluons, donc, ici ce soir en la personne de Rommel Duràn Castellanos, tous les membres du barreau qui œuvrent de longue date pour l’État de droit en Colombie. Et méditons leur constat qui accuse. Combien sont morts en vérité en Colombie ? Assurément beaucoup moins qu’au Mexique, mais ils seraient « 800 », si l’on en croit le chiffre cité en 2017 par le président del Comité Ejecutivo de la Abogacía en Colombia, Jairo Enrique Céspedes, sans que l’on puisse savoir depuis quand. Entre 400 et 500 depuis 1990 pour d’autres. La Caravane internationale de juristes se veut plus précise encore en chiffrer en date : selon elle, ce sont 400 avocats colombiens qui ont été assassinés depuis 1991. Ce qu’elle accompagne de ce simple commentaire révélateur : « personne n'a été poursuivi pour un seul meurtre ».
Qu’est-ce que la vie de certains avocats chaque jour en Colombie ?
Il arrive ainsi souvent que l’on ne sache pas exactement combien il y a eu de morts en Colombie. Au moins depuis le grand massacre des bananeraies de l'United fruit en 1928 : il n'est pas sorti de l'imagination du prix Nobel de littérature colombien Gabriel García Márquez, qui le raconte avec tant de force dans Cent ans de solitude. Le gouvernement reconnut treize morts et dix-neuf blessés par les Forces armées colombiennes. Mais lorsque la commission d’enquête du Congrès américain, fit ouvrir les fosses communes. Le nombre des victimes dépassait les mille cinq cent.
Au-delà de leur globalisation de leurs variations, de leurs oscillations, les chiffres du sinistre comptage conservent plus que jamais pour les avocats d’aujourd’hui sa réalité effrayante. En 2011, 24 étaient tombés. 24 ou 29 en 2012. Si l’on en dénombre au moins sept en 2018, pour ce qui est l’année 2019 à ce jour, alors que le 10e mois de l’année vient de s’achever, ils sont déjà 10 frappés par la mort. Un par mois, c’est plus encore que les années précédentes. Parmi les victimes trois avocates. Certes il y a n’a plus aux Philippines, où au Honduras, voire au Pakistan, mais nul ne peut en être sûr. Et c’est avec consternation et compassion, que nous devons songer ce soir que demain encore beaucoup de membres des Ilustres Colegios de Abogados sont voués à aux « tiros de sicarios ».
Car qu’est-ce que la vie de certains avocats chaque jour en Colombie ? Qu’est-ce donc réellement que d’être l’avocat de ceux qui en ont le plus besoin, en Colombie ? Quel est le prix à payer pour avoir voué sa vie professionnelle à la défense des prisonniers politiques, des minorités villageoises spoliées, comme les villageois de Pitalio ou des familles des victimes de disparitions forcées, tortures et d’exécutions extrajudiciaires perpétrés par des groupes paramilitaires parfois sous le regard des agents de l'État ? En 2016, c’est le frère de Rommel Duràn qui a été abattu.
Songeons ici, plus que jamais ce soir ici, à ce qu’ils sont contraints de vivre chaque jour, ces survivants provisoires de l’hécatombe. Représentons-nous bien en cet instant quel est le vécu quotidien de ces avocats devenus des cibles ? Il leur faut accepter de sentir en permanence la menace, dite ou non dite : la menace incessante, constante, perpétuelle, une menace suspendue, qui plane à chaque instant au-dessus de chacun de leurs actes de leur vie professionnelle et familiale. Chaque matin, apporte son lot nouveau de suspicions, de vérifications, de pressions, de dissuasion et d’intimidations. Chaque action suscite son cortège de surveillance et autre filature, d’insulte ou d’agressions physique, de vexation, d’interpellations ou arrestations. Dans les rues, il y aura aussi peut-être un inconnu qui vous abordera, anonymement et pourtant si reconnaissable, dans le costume de monsieur-tout-le-monde qui dissimule mal parfois une autre tenue, pour vous déconseiller fermement de continuer à vous occuper de certaines affaires en instillant pour que ce soit bien clair que d’aucuns connaissent bien votre adresse, les prénoms et les écoles de vos enfants… Tout cela pour le cas où d’aventure vous ne comprendriez pas.
Cela c’est la vie de certains avocats chaque jour, en Colombie. C’est cela le prix à payer pour avoir voué sa vie professionnelle à la défense des prisonniers politiques, des communautés marginalisées, des minorités spoliées, comme les villageois dépossédés de Pitalio, ou des familles des victimes de disparitions forcées, tortures et d’exécutions extrajudiciaires perpétrés par des groupes paramilitaires parfois, disent les ONG, sous le regard des agents de l'État ?
C’est le destin auquel sont voués non seulement les membres de la corporation José Alvar Restrepo mais aussi celles et ceux de la Corporation juridique Yira Castro, de l’association des avocats défenseurs Eduardo Umana Mendoza, du comité de solidarité avec les prisonniers politiques, du mouvement des victimes des crimes d’État, le MOVICE, Ou encore de l’Equipo juridico « Pueblos », à Bucaramanga et de de tant d’autres que l’on ne peut tout citer.
Chaque matin, ils savent qu’ils peuvent mourir, et chaque mois, chacun se demande lequel d'entre eux sera visé. Chaque mois, ils vivront, hantés par le spectre de ces tueurs cagoulés, chevauchant des motos venues de nulle part, qui surgiront brusquement, pour vider sur eux un chargeur de balles de 9mm avant de s’enfuir sans jamais risquer d’être retrouvés puisqu’ils ne seront pas recherchés. À tout moment, la mort pourra s’inviter, à la porte d’un garage, à la grille d’un jardin, devant un établissement scolaire, une salle de sport où l’on vient de conduire ses enfants et plus encore à chaque mètre du trajet journalier, qui a déjà été surveillé, épié et balisé. À Cali, un décret local a dû interdire le « parillero » c’est-à-dire à deux hommes de plus de 14 ans de monter sur la même moto de circuler sur la même moto. Tout motocycliste doit circuler avec son numéro minéralogique en évidence sur son casque sur sa veste. Pourtant rien n’y a fait. Il existe toujours ces fourgonnettes remplies d’hommes armés, ou plus simplement les faux clients avides de conseils urgents qui se présentent dans une salle d’attente avant de vider leur chargeur lors de la consultation.
...Il y a en Colombie un véritable « massacre »
Le problème demeure et demeurera, là encore, comme dans chaque pays, où il n’y a pas d’enquête effective et donc une impunité tacite garantie aux tueurs salariés comme à l’auteur intellectuel dans toutes les affaires sensibles (vis-à-vis du régime au pouvoir, vis-à-vis d’adversaires puissants comme les grandes sociétés internationales ou les grands propriétaires fonciers, voire face aux crimes organisés). L’avocat toujours désarmé y est naturellement sacrifié quel que soit son camp : qu’il s’expose courageusement à l’adversaire pour défendre la victime ou qu’il soit l’avocat de membres de l’organisation criminelle qui lui font payer les espérances téméraires qu’il a pu donner à ses clients quant à une issue trop confiante. Puisqu’il est du devoir de l’avocat de les défendre aussi. Même un avocat de cause paisibles purement civile, impliquant qu’il ne sache ou non, des parents des proches des relations de narcotrafiquants exposé à payer de sa vie son intervention dans un dossier.
Car, il y a en Colombie un véritable « Massacre » (le mot déjà ancien est d’Alejandro Arenas, alors doyen du Collège des Avocats de Cali). Il s’agit bien d’un massacre organisé des avocats, uniquement parce qu’ils sont avocats. Par ce qu’il doivent payer de leur vie le prix de la profession qu’ils exercent dans l’intérêt de la société et de l’Etat de droit. Massacre ! Le doyen a appelé le gouvernement à « une action décisive contre le massacre qui est commis contre les avocats de la Colombie, dont la seule arme pour se défendre est la force de la loi ». Il a ajouté : « l'Etat colombien n'a pas fourni une réponse adéquate aux nombreuses demandes adressées aux autorités de prendre des mesures pour assurer la sécurité des avocats ».
Le plus souvent cette réponse adéquate ne viendra pas. Aujourd’hui, Rommel Duràn Castellanos l’attend encore malgré les lettres du groupe d'avocats, Colombia Caravana à l'Unité de Protection des Victimes, pour demander en sa faveur des mesures de protection du gouvernement. Ou lorsqu’elle vient, elle vient trop tard ou trop brièvement. Au demeurant, s’agit-il d’une réponse adéquate ?
Au cours du mois de février de cette année, Adil José Meléndez Marquez, un avocat spécialisé dans les poursuites engagées contre les paramilitaires dans la région du nord de Bolivar, s’est vu retirer plus exactement limiter sa protection par des gardes du corps. Sa voiture blindée lui a été retirée, mais il n’a droit à la protection que lorsqu'il se trouve à Carthagèna, alors que c’est dans les zones rurales qu’il intervient le plus souvent dans les affaires de restitution de terres notamment pour les communautés des Caraïbes colombiennes et qu’ils courent les plus grands risques. Paula Rosero Ordóñez, quant à elle, était une avocate de 47 ans. Elle aussi avait dû bénéficier de mesures de protection il y a trois ans tant les menaces qu’elle avait reçues s’était faite plus précise et plus insidieuse mais trop vite la protection lui avait été retirée. Le 20 mai de cette année, après avoir été si longtemps traquée et menacée, elle est morte sous les balles de deux hommes à moto alors qu'elle retournait à son domicile, à Samaniego, dans le département de Nariño.
Ainsi les décennies ont passé mais en 2019, rien n'a changé, il y a toujours le même danger. Et l’on ne peut s’empêcher de penser, dans notre confort, à la vie de tous ses confrères qui vivent depuis lors premier jour sous la menace de la mort.
Gabriel García Marquez, affectueusement connu sous le surnom de "Gabo" en Amérique latine, disait « Se souvenir est facile pour ceux qui ont de la mémoire, mais oublier est difficile pour ceux qui ont du cœur ». Entre la mémoire et le cœur nous n’avons pas à choisir. Ce soir pour Rommel Duràn Castellanos et pour tous les avocats colombiens, nous nous devons de marier indissolublement la mémoire et le cœur et après nous être souvenus, avec lui, nous engager désormais à n’oublier jamais le soutien que nous leur devons. C’est cette alliance qui donne tout son sens au prix que nous lui remettons ce soir.
Bertrand FAVREAU
Le Prix
Créé en 1984, le Prix est décerné chaque année conjointement par
l’Institut des Droits de l’Homme du Barreau de Bordeaux, l’Institut de
Formation en Droits de l’Homme du Barreau de Paris, l’Institut des Droits de
l’Homme du Barreau de Bruxelles, l'Unione forense
per la tutela dei dirittidell'uomo (Rome) la Rechtsanwaltskammer
de Berlin, le barreau de Luxembourg, le barreau de Genève, le barreau
d’Amsterdam ainsi que l'Union Internationale des Avocats (UIA) et l’Institut
des Droits de l’Homme des Avocats Européens (IDHAE), qui contribuent à la
dotation du prix (20 000 €).
Un an après sa création, le Premier Prix a été attribué le 27 mars
1985 à Nelson Mandela alors emprisonné depuis 23 ans en Afrique du Sud. Il a
été remis officiellement à sa fille, le 27 avril 1985. C’était alors le
premier prix qui lui était décerné en France et le premier dans le monde par
des confrères avocats. Cinq ans plus tard, le 11 février 1990, Nelson Mandela
était libéré. A partir de cette date, le prix a été de nouveau attribué.
Le Prix avait été attribué en 2018 à l’avocate iranienne Nasrin SOTOUDEH condamnée à une peine de 38 années de
prison et 148 coups de fouet.
Il est la plus ancienne et la plus prestigieuse des récompenses
réservées à un avocat puisque son origine remonte au message de Ludovic
Trarieux (1840-1904), fondateur, en 1898, au moment de l'Affaire Dreyfus, de
la « Ligue des Droits de l'Homme et du Citoyen « : « Ce n'était pas seulement
d'ailleurs la cause isolée d'un homme qui était à défendre, c'était, derrière
cette cause, le droit, la justice, l'humanité ».
Ont été
successivement lauréats :
1985: Nelson MANDELA (South Africa)
1992: Augusto ZÚÑIGA PAZ (Peru) †
1994: Jadranka CIGELJ (Bosnia-Herzegovina)
1996 Nejib HOSNI (Tunisia) and Dalila MEZIANE (Algeria).